Au commencement était le verbe et… Mareva. Mareva Galanter, la fille de Tahiti, des concours de beauté et du cinéma, splendide personne qui réuni toutes les qualités pour rendre heureux un homme normalement constitué et mêmes les autres : elle paraît sympa, sacrément jolie et n’a pas l’air de rechigner pour être satisfaite d’une soirée mousse aux bains douches. Seulement voilà, Mareva décide un beau jour de reprendre quelques fleurons des années yéyés et de les accompagner de titres underground de l’époque. Qu’on touche à B.B. passe encore mais Jacqueline Taïeb, j’étais déjà contre. Je pestais sur ma grisaille en lui préparant une chronique qui commencerait par « ma fille, t’es bien gentille mais tu touches au sacré : hors de question !». Elle devait payer. Bon finalement avant d’attaquer ma chronique, j’ai écouté son « Ukuyéyé » et comment dire : admirable, étonnant, et brillant résumeraient bien la situation. Mareva, vous êtes ma yéyé préférée. Grâce à vous : « e mahana to te 'uri » (je garde la signification pour elle et moi) et je vous remercie pour ces 13 rayons en plein cœur.
Pierre : Vous chantez « si je pouvais séduire quelques journalistes » dans « Pourquoi Pas Moi » je tenais tout d’abord à dire que vous en avez au moins convaincu un, c’est à dire moi ? Mareva Galanter : (rire) C’est mignon ! ça fait plaisir ! Pierre : Alors pourquoi êtes vous l’une des premières à faire très bien « wo wo wo et yé yé yé yé » ? Mareva Galanter : Parce que je me suis entraîné très dur pour ça ! j’ai travaillé des nuits entières…Comme j’étais pas trop sixites, il fallait qu’entre Tahiti, les années 60 et moi ça le fasse donc j’ai bossé ! Pierre : Mareva est donc une new fan des sixties ? Mareva Galanter : Oui et non, c’est à dire que les sixties, c’est omniprésent chez tout le monde et depuis longtemps. Pour moi c’est pareil : j’aime les mythes de Françoise Hardy ou de Brigitte Bardot, des chanteuses qui étaient des icônes dans les années 60 sans être pour autant imprégnées et complètement addicts de cette époque. Il y avait quelque chose comme ça qui traînait, je l’avoue : un truc qui n’appartenait pas forcément à ma culture mais qui me fascinait quelque part. C’est un ensemble qui était attractif dans ces années : le ton des paroles, la gaieté insouciante, la légèreté ensuite la qualité des mélodies et ces chanteuses françaises qui étaient très jolies, qui ne cachaient pas leur beauté et qui étaient donc libérées par rapport à tout ça. Quand je m’y suis vraiment intéressée, j’ai découvert des chansons alternatives… Pierre : J’ai été surpris dès votre premier titre « 7 heures du matin » et je vous l’avoue comme j’adore également cette période : vous la chantez aussi bien que Jacqueline Taïeb ! Mareva Galanter : C’est gentil… quand je suis arrivé à Paris il y a 7 ans, j’étais tombé en arrêt sur une compile où il y avait ce titre. Cette chanson m’avait vraiment mise de bonne humeur, j’aime le rythme. Quand j’ai présenté cette idée d’album, j’y ai aussitôt pensé. Pierre : On s’imagine qu’il y a beaucoup plus de votre vie que l’on pourrait le croire au début quand on fait un disque de reprise? Mareva Galanter : Vous êtes bien curieux ! vous avez bien trouvé de drôles de choses ! (rire). Je me suis servi des années 60 pour me retrouver quelque part. C’était une façon pour moi de m’exprimer réellement à travers les titres des autres. Pierre : Quelle défense utiliseriez vous si ces artistes que vous reprenez venez vous chanter « ils ont changé ma chanson » ? Mareva Galanter : J’ai parlé à Stella et à France Gall qui étaient enchantées donc moi encore plus qu’elles ! Pierre : Et ce ukulélé vous l’avez maîtrisez pour vous rappeler votre île, ou toute jeune on vous l’a mise dans vos mains ? Mareva Galanter : C’était un rapprochement avec mes origines. J’ai grandi avec ce son qui est vraiment le son de la joie, de la fête, de la gaieté. C’était un défi ou un challenge que de vouloir intégrer cet instrument qui vient de l’autre bout de la terre et qui n’est pas rock ou pop et ça été très bien fait par Sylvain Vanot. Pierre : Comment fait on pour convaincre un Sylvain Vanot ou un Albin de la Simone de vous suivre sur ce projet que vous avez porté dès le début ? Mareva Galanter : Tout ce concept était assez improbable et infaisable pour tout le monde. La première personne que j’ai rencontrée, c’est mon réalisateur Jacques Ehrhart qui a fait des albums sublimes pour Chamfort, Camille, Henri Salvador bref quelqu’un qui a réalisé des albums exceptionnels et je lui ai parlé de mon projet, il trouvait juste que c’était tellement suréaliste qu’il a dit oui. C’était pour lui improbable d’allier le ukulélé, les années 60, moi, ça le faisait beaucoup rire et j’ai réussi à lui vendre mon truc. A le persuader que c’était super. Et c’est comme ça que ça s’est passé avec les autres. Je leur racontait ce projet surexitée car j’en avais vraiment envie et ils voyaient que j’étais très motivée pour le faire. Du coup, ils m’ont suivi sans savoir où ils allaient. Ils ont dit « on vient, on sait pas ce que ça va donner mais on y va avec toi ». Ce qui a fonctionné aussi, c’est que nous n’étions pas dans une machine. Pierre : Jacno sur 2 titres vient lui mettre son grain de poivre à votre album sucré ? Mareva Galanter : Je cherchais un duo mais je voulais une voix d’homme pas très loin de celle de Gainsbourg, une voix qui ai du vécu et j’ai entendu une chanson de Jacno qui s’appelait « l’hymne à la mauvaise foi » et j’ai tout de suite voulu le rencontrer. On lui a fait écouter les maquettes de « Ne dit Rien » il a trouvé que la production était excellente, que ma voix était bonne et le jour où il est venu pour enregistrer le titre on venait d’enregistrer « Bang-Bang » il a trouvé ça sublime et je lui ai demandé s’il voulait bien m’accompagner aussi sur ce titre. Pierre : C’était important aussi de mettre une chanson originale comme « Miss Hinano » ? Mareva Galanter : Oui mais d’abord ce n’est pas n’importe laquelle car elle a été écrite pour moi. Elle parle de ma vie de manière imagée, elle résume totalement d’où je viens. Cela annonce peut être une suite. Même si les autres j’ai cherché à ce qu’elles me ressemblent à peu près au moins celle ci est vraiment pour moi. Pierre : Cet album est insouciant et en totale contradiction avec l’époque très préoccupée, pensez vous que les gens ont besoin de s’évader ou son succès est-il simplement du à de la nostalgie ? Mareva Galanter : Je pense que c’est un désir d’évasion. C’est un moment où l’on se fait plaisir. Je ne pense pas que cela soit, et je n’ai pas voulu qu’il soit nostalgique. Je n’ai pas vécu cette période donc ce serait plutôt une fascination et l’envie de les remettre à jour, les revaloriser. Pour que la nouvelle génération puisse découvrir des titres oubliés. Il y a beaucoup de reprises où l’on reprend les paroles et l’on en fait tout une autre musique mais ici non car les orignaux sont déjà super bien. Pierre : Beaucoup des artistes de cette époque n’étaient que des interprètes alors que maintenant la mode est aux auteurs-compositeurs ? Mareva Galanter : Moi cela me plait d’être interprète, d’être égérie. Ca me plait de travailler pour les autres et de sublimer le travail des autres. Je ne revendique pas le fait d’être compositeur ou auteur… Pierre : Quand on regarde le parcours de ces égéries des sixties, ils ont tous un destin tragique ? Mareva Galanter : C’est peut être du au fait qu’il y avait une fascination qui fait qu’elles ont toutes fini avec des rockers pas possibles, elles ont eu des destins très rock n’roll. Après je ne vais pas aller jusqu’à dire que j’aimerais terminer de la même manière. (rire). Pour l’instant je ne vais pas jusque là.(rire) Pierre : Vous déclarez souvent que vous avez toujours chanté mais que vous ne savez pas chanter, n’est ce pas le meilleur moyen pour réussir ce projet ? Mareva Galanter : Si ! si j’avais considéré que j’étais chanteuse et que j’avais une voix sublime je n’aurais jamais fait cette album. L’idée originale que j’avais ce n’était même pas moi qui devait chanter. Je ne vante pas mes qualités de chanteuse, mais en tout cas ça me plait bien ! Quand on ressent, quand on le fait avec spontanéité, envie et plaisir, il y a des choses dont on fait abstraction car sinon le fait de chanter juste cela m’aurait traumatisé et je ne l’aurais pas fait. Les injustesses de ce disque font partie de moi. Pierre : La particularité de cette époque c’était aussi de faire des singles, des 45 tours, un « one shoot » en quelque sorte, alors est ce que votre album est un coup unique ou allez vous poursuivre l’aventure de la chanson ? Mareva Galanter : J’aimerais bien poursuivre l’aventure. Comment, je ne le sais pas encore mais c’est dans ma tête. En même temps l’aventure se poursuit déjà car je commence la scène. Ca continue d’être surréaliste. On va chanter en province, à Paris, à Moscou, à Londres. L’étranger a aussi un réel enthousiasme pour cet album. Pierre : Bon allez sans réfléchir la plus belle pochette de disque des années yéyé ? Mareva Galanter : «(elle réfléchit) bon sans réfléchir ce n’est pas possible (rire). Laissez moi deux secondes. Je ne sais pas si j’en ai une préférée mais ces pochettes en carton toutes vieillies, ces disques que j’ai trouvé, leur odeur… c’est comme les vieux livres ce sont de beaux objets. Tous ces disques avec ces photos superkitchs sont belles, il y a des couleurs, un lettrage, un style graphique particulier. Je trouve qu’à l’époque rien n’était laissé au hasard. J’ai essayé de le faire aussi. J’ai voulu tout choisir, quand on veut créer un univers c’est très important de le faire jusqu’au bout. Mon affiche de concert aussi. Cela fait parti d’un ensemble. Pierre : Je défends aussi bien Mercury Rev que le dernier Dick Rivers, nous sommes donc en adéquation ? Mareva Galanter : On est en totale adéquation. Dick Rivers c’est un peu mon parrain c’est lui qui m’a offert ma première scène aux Franco devant 9 000 personnes. Pierre : Est ce que ça aide à faire un disque lorsqu’on est jolie ? Mareva Galanter : Je ne suis pas sur. Ca aide à avoir des jolies photos mais une fois que l’album est fini. Pierre : Enfin, la rebelle que vous êtes s’est elle enfin assagie avec cet album ? Mareva Galanter : Je ne pense pas du tout ! au contraire ! Je crois qu’elle s’est affirmé.