Avec sa voix un rien cassée, « Ours » débarque dans le bestiaire de la chanson française avec un premier album « Mi ». Vous avez du déjà entendre son titre au poil qui s’intitule « Le Cafard des Fanfares ». Avec ses airs de ne pas y toucher (rappelant son père Alain Souchon), il promène ses griffes dans la rue du quotidien. Ne vendez pas sa peau trop rapidement car « Mi » est certainement la première note d’une gamme.
Pierre : Se faire appeler « Ours » c’est pour stigmatiser votre état moral de tout les jours ? Ours : Ce n’est pas mon état moral, c’est parce que lorsque j’écris des chansons, quand je fais un disque, c’est vrai que je suis dans ma chambre, assez isolé. Et « Mi » est le fruit d’un travail solitaire. Dans la vie, je m’appelle Charles mais quand je fais de la musique, je suis assis sur mon lit en tailleur, un peu comme si j’hibernais. Un jour, j’ai décidé de montrer tout ce travail solitaire aux gens et de le mettre sur un disque comme l’ours sort de sa tanière et part dans la nature. Pierre : Dans votre dossier de presse, il est mentionné que la musique est un atavisme familial, croyez vous que la musique soit quelque chose qui se transmet ? Ours : Bien sur, mais l’on peut aussi se forger notre propre goût sans se soucier du goût des autres. Pierre : L’hibernation avant l’arrivée de « Mi » fut longue ? Ours : Pour que ce premier album sorte de sa cachette, il a mis pas mal de temps. Parce qu’en fait, je ne me suis mis à écrire des chansons que vers 22 ans. Au début je me suis forgé, je me suis cherché pour enfin me trouver, donc j’ai jeté beaucoup de textes à la poubelle. Sérieusement, ça fait 6 ans que je m’y suis mis « officiellement » mais pour ce disque il a fallu 4 ans. 4 ans pour affiner l’affaire. Pierre : « Il était Temps », comme vous le chantez ? Ours : Oui il était temps que je trouve ma voie, que j’ai un métier, que mon rythme change au niveau de vie, car j’étais un peu déconstruit à ce niveau là. Pierre : Dans l’album, j’ai noté beaucoup de thèmes qui sont des sortes de vengeance, est ce que cet album est une manière de prouver vos qualités ? Ours : Bien évidemment ! Ecrire des textes, les chanter c’est se mettre en avant, prouver quelque chose, peut être que l’on veut séduire aussi. Pierre : Vous êtes comme une bouteille d’Orangina : c’est à dire que pour vous apprécier, il faut vous secouer ? Ours : (rire) Exactement ! C’est tout à fait ça. Pierre : On vous connaît par « Le Cafard des Fanfares », est ce que ce cafard est perpétuellement en vous ? Ours : Non. Il a juste déclenché mon envie d’écrire des chansons. Je ne veux pas que ce mot « Cafard » soit plombant, c’est pour ça que j’ai fait une musique sautillante pour accompagner le texte. Le cafard n’est pas grave, c’est un petit pincement au cœur, ce n’est pas une déprime. On est dans un état d’âme qui a été constant chez moi surtout à un moment, et qui est passager maintenant. Ce sont des moments où l’on n’est pas dans le coup. On n’a pas envie de faire la fête, c’est le moment où l’on est sur une plage où il fait très beau et pourtant on n’a pas envie de profiter de ce moment. Pierre : Nina est un personnage récurant dans vos chansons, a t’elle une existence physique ou est ce une somme de toutes les filles que vous avez rencontrées ? Ours : C’est la femme de toutes les femmes. Elle n’existe pas. Lourde à gérer mais elle est aussi attendrissante, on a envie de la serrer dans ses bras et de lui faire un bisou à cette Nina. Pierre : Dans l’album vous semblez grandir au fur et à mesure des chansons ? Ours : Oui, vous savez « Le Cafard des Fanfares » je l’ai écrit en premier et « Mi » celui que j’ai écrit en dernier, donc en effet il y a sûrement une évolution. Pierre : Quelles furent vos influences pour cet album ? Ours : Vous savez j’écoute plein de musiques, j’aime toutes les musiques. Je les écoute d’ailleurs trop, au point de les analyser, jusqu’au moindre détail et ça depuis mes 10 ans. J’ai un goût pour les chansons pointues, un peu sophistiquées mais qu’elles restent accessibles. Des chansons généreuses aussi. J’essaye de tendre à ça. Mes références sont aussi Steve Wonder, les Beatles, de la chanson française : Michel Berger, France Gall, Camille, Matthieu Boggaerts, M. J’aime Manu-Chao aussi, j’aime quand c’est léger. Pierre : Dans votre disque on entend beaucoup de rythmes qui viennent des caraïbes, du zouk aussi ? Ours : J’écoute beaucoup de musique brésilienne. Ce qui m’attire dans cette musique, c’est le côté mélancolique et en même temps solaire qui rend joyeux. Ces chansons sous leur forme légère qui évoquent des serrements au cœur. Pierre : Faire les premières parties de Michel Jonaz quand on est fan, c’est flippant ? Ours : Non c’est pas trop flippant. Il a été très gentil, il a bien aimé ma musique… et de manière courtoise : il m’annonce avant que je débute ma première partie. Ce n’est pas flippant car les gens ne sont pas venus pour nous, on arrive, on s’accroche un peu aux planches. Ce qui est bien, c’est que les gens ne sont pas exigeants avec nous. Mais je suis très heureux que Michel Jonaz m’ait choisi.