Marie Modiano parle comme une femme qui serait douce souvent et canaille parfois. Marie Modiano chante de la même manière. Marie Modiano n’a jamais cherché la facilité d’un nom prédisposé à la lumière. Et sans vouloir l’enfoncer un peu plus dans les louanges, son disque est très bon. Marie, la petite Marie, sera bientôt seule, sans acolyte, en concert pour la nuit du folk et du songwritting qui aura lieu le 07 octobre au Grand Mix de Tourcoing. Rencontre avant cette date importante et retour en arrière sur la conception de son album.
Pierre : Je suis désolé de vous le dire mais malgré le titre de votre album vous me semblez une très belle rose qui semble s’épanouir dans un jardin musical parfait ? Marie Modiano : C’est très gentil ! Pierre : Alors comme ça c’est vrai que vous faisiez l’école buissonnière pour écouter des disques avec votre mère ? Marie Modiano : Ca c’est un peu, comment dire : un dossier de presse trafiqué (rire) mais tout ça pour dire que j’écoutais beaucoup de musique avec ma mère et ces artistes m’ont marqué beaucoup. Je ne sais pas si c’est le fait de les avoir écouté très jeune mais en tout cas je lui dois beaucoup dans la découvertes des artistes qui allaient me toucher plus tard. Pierre : On peut avoir quelques noms ou c’est indiscret ? Marie Modiano : Beaucoup d’artistes de la Motown : Steve Wonder, Otis Reading, de la musique soul, et un peu plus tard beaucoup de folk avec Bob Dylan, du blues avec Robert Johnson. Pierre : En écoutant votre disque je me suis dit que votre maman vous avez baigné aussi dans Tom Waits ? Marie Modiano : C’est venu plus tard. J’aime beaucoup. Pierre : En parlant de votre maman, lui avez vous ramené la joie qu’elle souhaitait pour vous comme vous le chantez sur « Little Mum »? Marie Modiano : Je ne sais pas, faudrait lui demander (rire). Souvent quand j’écris c’est un mélange de choses personnelles et des balades dans mon imaginaire. Parfois on se met dans la peau de personnages qui ne sont pas forcément vous. Un patchwork de choses vécues et imaginées. Pierre : Pourquoi quand moi je dis Honolulu ça tombe à plat et que vous, vous nous donnez le frisson en chantant ce simple mot ? Marie Modiano : «(rire) Mais vous le dites aussi très bien. Au départ c’est vraiment venu de la sonorité de ce mot que je trouvais marrante. Ensuite j’ai tissé un canevas autour. J’avais la mélodie et j’ai imaginé une histoire qui se passait à Honolulu. Pierre : Merci de me le répéter à nouveau mais aviez vous conscience depuis longtemps d’avoir une si belle voix ? Marie Modiano : Souvent quand on écrit ses textes et qu’on a fait sa mélodie il y a une chose naturelle qui se passe : on habite, on essaye en tout cas, d’habiter chaque mot beaucoup plus facilement. Mais après je l’ai beaucoup travaillé, plus on fait plus on progresse. Mais j’ai encore beaucoup à apprendre. Pierre : Devenir chanteuse n’était pas un but ultime quand vous étiez plus jeune ? Marie Modiano : Si quand même, mais cela a mis du temps. J’écrivais beaucoup mais cela restait entre moi et moi-même. Il m’a fallu beaucoup de temps pour oser et prendre confiance. Pierre : D’où vous est venu le déclic, après vos voyages aux état-unis, en chine ? Marie Modiano : Peut être le fait d’avoir glaner tous ces histoires dans mes voyages… je ne sais pas. Se dire et être chanteuse cela devient réel à partir du moment où vous ne faites plus que ça. Mais le déclic a vraiment été progressif. J’ai été beaucoup aidé pour m’imaginer chanteuse par ma collaboration avec Grégoire Hertzel qui a produit l’album. Nous avions une entente musicale parfaite. On se complétait. Lui vient de la musique classique, moi j’ai d’autres références. Il y avait une motivation, une émulation entre nous. On composait vraiment beaucoup de chansons. Une fois que la machine est lancée, que le bouton est enclenché c’est d’une limpidité… Pierre : Vous aviez 50 chansons maquettées c’est ça ? Marie Modiano : A peu près. Même plus ! car après j’en ai écrites beaucoup toute seule, du coup cela nous a permis de piocher et de choisir les plus cohérentes. Pierre : Depuis 2004 vous rodez vos chansons sur scène ? Marie Modiano : Oui, avant d’enregistrer l’album nous n’avions pas fait énormément de dates mais cela nous a permis de tester celles qui marchent et celles qui fonctionnent moins bien. Mais pour ces 10 titres il y a vraiment eu une sélection naturelle. Pierre : Avec le parti pris d’être dans l’acoustique du début à la fin ? Marie Modiano : Oui c’est ça, tout s’est enregistré avec tous les musiciens ensemble. Souvent quand les choses sont trop coupées on perd de l’émotion alors qu’ici on a essayé de donner une certaine symbiose. Pierre : Vous êtes partie, comme beaucoup d’artistes, à Berlin pour enregistrer ce disque ? Marie Modiano : C’est une ville au départ que j’adore. Je partage mon temps entre Paris et Berlin. C’est une ville qui m’inspire. Je suis partie là bas car mon éditeur m’avait parlé de ce studio. Il m’en a parlé d’une manière intrigante, mystérieuse. C’était l’ancien bâtiment de la radio en Allemagne de l’est. J’avais envie, comme j’avais composé la plupart des chansons à Paris, de me retrouver dans une autre atmosphère pour enregistrer le disque. Pierre : Vous avez suivi le même cheminement que le groupe Phoenix ? Marie Modiano : On a enregistré dans le même bâtiment mais pas dans le même studio. Là bas on est guidé par son instinct. Ensuite c’est le rêve de rencontrer les musiciens, de voir que cela colle parfaitement. Pierre : Je ne vais pas vous embêter longtemps avec votre filiation paternelle mais votre père trace souvent ses thèmes autour d’un narrateur se trouvant presque toujours en observateur et je retrouve quand même beaucoup ça dans votre disque ? Marie Modiano : Ha oui ? peut être… après je n’y ai pas plus pensé que ça. Ce sont quand même deux formes très différentes. Chacun son univers… mais peut être… Pierre : Au fait vous a t’on déjà souvent prise pour la fille du grand photographe ? Marie Modiano : Mondino ? (rire) Non, mais les noms sont assez proches. J’ai fait une séance avec lui. D’ailleurs parfois je reçois du courrier à son nom. (rire) Pierre : Sur la pochette, il y a un moniteur qui indique un gros « Warning » de quoi devons nous nous méfier face à marie Modiano ? Marie Modiano : «(rire) ha ha ! franchement de rien ! vous pouvez y aller tranquillement, il n’y a pas de danger. Pierre : Je peux donc venir vous voir quand vous passerez au Grand Mix à Tourcoing ? Marie Modiano : Bien sur mais là ce sera assez intimidant pour moi car c’est la première fois où je jouerai seule. Surtout ce seront des chansons qui ne sont, pour la plupart, pas sur l’album. J’avais envie de faire quelques dates en solo et ce sera une grande première. Je désirais passer par cet exercice pendant un moment avant de retrouver mes camardes. Va falloir être très gentil avec moi (rire).