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Interview

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Yann Tiersen « On Tour » c’est de l’émotion à l’état brut. Sur disque ou par le film de sa collaboratrice visuelle il transmet un son, une certaine image nette et sans bavure de sa tournée à travers le monde. Quelques instantanés captés à l’arrache d’un bled ou d’un festival.

Pierre :
Peut on dire que ce live est un disque totalement original ?
Yann Tiersen :
Carrément, pour moi c’est un nouvel album. Je pense qu’il est résolument rock sans que ce soit une volonté préméditée.
Pierre :
Ne vouliez vous pas casser une marque de fabrique « Yann Tiersen » ?
Yann Tiersen :
Je n’aime pas casser les choses. J’aime bien m’en servir au contraire. Tout bêtement pour avancer, garder la créativité je dois passer par ce changement.
Pierre :
Quand je vous ai vu sur scène, vous jouiez depuis déjà une bonne heure alors que quelques personnes dans la salle se demandaient encore quand vous alliez arriver car ils ne s’attendaient pas à entendre ce genre de concert ?
Yann Tiersen :
C’était au début de la tournée. J’espère que maintenant c’est terminé ! (rire)
Pierre :
Le son de ce disque est formidable, on s’y croirait, est ce que ce fut dur à enregistrer ?
Yann Tiersen :
C’est F.Flor qui a enregistré l’album, il est arrivé avec un petit portable et une carte son et voilà c’est tout. Simple et léger. Prendre un maximum de concerts. Enfin je dis « simple » mais pour lui ça ne devait pas l’être, mais ça n’avait rien à voir avec une énorme machinerie.
Pierre :
Vous avez enregistré sur toutes les dates ?
Yann Tiersen :
Non une vingtaine.
Pierre :
Comment fait on ensuite quand on se retrouve à la maison pour choisir entre toutes les prises ?
Yann Tiersen :
En fin de compte j’ai laissé Fabrice choisir dans les souvenirs qu’on avait des concerts. Quand un concert est bon, on s’en souvient beaucoup mieux et on le sait(rire). Ce qui est rassurant c’est qu’on a pris beaucoup de choses sur les dernières dates enregistrées. Il y a beaucoup dans ce disque des concerts de juillet 2006.
Pierre :
Contrairement à votre précédent live qui était pléthorique, dans celui là il n’y a « que » 10 titres ?
Yann Tiersen :
C’était une volonté. Dans le premier live on avait eu l’occasion de faire une tournée avec un orchestre et je tenais à en rendre compte. On avait enregistré 3 soirs à la cité de la musique. C’était bien d’en faire profiter les gens. C’était une sorte de témoignage. Je n’aurais pas pu faire cette expérience 10 fois, d’ailleurs je ne sais pas si je pourrais le refaire un jour. Celui là, on a vite senti que l’on s’épanouissait vachement en déplaçant les choses. Il y avait des émotions que je tenais à faire partager. Par exemple c’est la première fois que je suis en tournée tout en ayant la possibilité d’écrire de nouveaux morceaux. D’habitude je ne pouvais pas composer et jouer. Alors qu’avec « On Tour » j’étais porté par quelque chose de neuf. C’est un véritable album qui s’est construit au fil du temps et des dates. Sur la route.
Pierre :
Vous aviez donc le temps d’écrire et comme on peut le voir sur le DVD jouer au badmington 10 mn avant de rentrer sur scène ?
Yann Tiersen :
Je ne suis jamais mieux que dans les festivals par exemple où je peux aller voir un concert avant. Le changement de plateau dure généralement un quart d’heure et j’ai donc largement le temps d’écouter le concert précédent sans vraiment stresser sur mon propre set. Je n’aime pas me préparer à l’avance.
Pierre :
C’est peut être un moyen d’éviter le trac ?
Yann Tiersen :
Ce qui me fout le trac ce sont les prestations live à la radio. Sur scène je me sens chez moi. Ce n’est pas prétentieux mais il y a une relation avec le public, un vrai plaisir. Ce qui est génial, quand on a un nouveau morceau, c’est justement de pouvoir le répéter l’après-midi et le jouer sur scène le soir et avoir tout de suite une réaction qu’elle soit positive ou négative. De toute manière même dans mes albums je ne crois pas au disque parfait. Je pense que c’est qui est déjà beaucoup c’est d’être sincère et de prendre du plaisir, après la perfection technique ou instrumental on s’en fout !
Pierre :
Ce disque était en préparation depuis longtemps ?
Yann Tiersen :
Quand on a commencé les répétitions je me suis dit « on tient quelque chose de rare, il faut l’enregistrer.
Pierre :
C’était une évidence pour vous et la maison de disque ou seulement pour vous ?
Yann Tiersen :
Pour moi et pour eux, on était d’accord. J’ai la chance de pouvoir faire ce que je veux, de toute façon si ce n’était pas le cas je me barrerais ! (rire). Surtout maintenant, j’ai envie de sortir des disques quand artistiquement c’est le moment. Pas attendre une période. Je ne crois pas qu’il faille attendre un cycle de 4 ans pour être dans le coup. Je pense que ce n’est pas vrai, on ne fait pas un disque parce que c’est le meilleur moment dans une date ou il n’y a pas d’autres sorties, etc. On fait un disque parce qu’on a besoin de le faire.
Pierre :
Auriez vous sorti l’album live en CD si le DVD parallèlement n’avait pas été fait ?
Yann Tiersen :
Ce sont deux choses complémentaires. Indépendantes et à part entière. Aurélie Du boys qui a réalisé le DVD, avait carte blanche pour faire un film musical, en toute liberté. Son approche visuelle, sans unité de temps et de lieu, cette espèce de grand chantier se rejoint avec ce que je voulais faire avec les sons.
Pierre :
Vous aviez déjà fait appel à elle pour « La Traversée » ?
Yann Tiersen :
« La Traversée » on l’a fait beaucoup ensemble. Pour celui là, elle savait où elle voulait aller. J’étais en tournée à m’occuper de ma musique et elle était une cinéaste qui faisait un film sur la tournée d’un artiste. Il y a des moments, notamment le passage avec Elisabeth Fraser, qui m’ont sidéré. C’est vachement beau.
Pierre :
La politique des maisons de disque c’est de sortir un CD live et un mois plus tard un DVD de la même prestation alors que vous, les 2 sortent en même temps ?
Yann Tiersen :
Oui ce sont deux choses différentes qui se ressemblent sans s’annuler où l’un prendrait le pas sur l’autre. Le CD est court avec 10 titres alors que sur le DVD, il y en a une trentaine. Je voulais les sortir en même temps car c’est complémentaire. Au départ, je voulais même que les 2 sortent dans un ensemble CD-DVD ce qui n’était pas possible financièrement.
Pierre :
Est ce que vous êtes, comme les réalisateurs et les acteurs de cinéma pour les entrées, a l’affût des premiers chiffres de ventes ?
Yann Tiersen :
J’ai envie de savoir, surtout en ce moment où l’industrie du disque n’est pas très rose. Mais en même temps je vais pas me prendre trop la tête avec ça.
Pierre :
Que ce soit sur l’un ou l’autre des supports, on voit que vous prenez du plaisir à chanter, c’est presque une nouveauté ?
Yann Tiersen :
De plus en plus. En ce moment on fait des sessions acoustiques à la radio avec 2 guitares et je prends un réel pied.
Pierre :
Votre timbre de voix se rapproche de Dominique A ?
Yann Tiersen :
Ha bon ! c’est gênant cette comparaison pour la voix de Dominique (rire). Vous avez entendu la mienne ? (rire). Tout ce que je peux dire c’est que je chante de plus en plus dans l’aigu. J’ai longtemps était dans le grave mais ce changement à l’air de me plaire.
Pierre :
Et vous offrez aux gens un duo d’enfer, avec une belle prestation with Diam’s ?
Yann Tiersen :
On a entendu ce morceau « La France à Moi » dans le bus et le texte était mortel. C’était pertinent poétiquement, je trouve que Diam’s est très intègre et très rock n’roll en fin de compte. Du coup quand le Printemps de Bourges nous a demandé d’inviter quelqu’un je lui ai demandé. Ce fut une super rencontre. J’écoute beaucoup de rap. Je trouve qu’il y a dans le rap un vrai discours social et politique. Ce n’est pas une obligation mais les valeurs, l’esprit « rock », et cette espèce de contre culture je les ressents, tout du moins en France, dans le rap. Les gens du rock s’expriment plus dans les grands magasins, en s’achetant des fringues plus que dans le discours et dans le texte.
Pierre :
Vous avez sillonné le monde, qu’est ce qui vous attire hors de nos frontières ?
Yann Tiersen :
En fin de compte le public français c’est le cliché du français : il se regarde trop le nombril. Surtout depuis que le climat politique et social s’envenime. Il y a une espèce de chape de plomb qui plane sous forme de nuage de mauvaise augure. Dès qu’on passe les frontières, il y a un premier degré, une énergie et une communion beaucoup plus forte.
Pierre :
J’ai une question totalement bizarre mais pourquoi sur le livret, certaines dates sont encadrées en rouge et d’autres non ?
Yann Tiersen :
Ce sont les lieux où nous avons captés les images et les sons qui sont sur le CD et le DVD. Mais je trouvais important de mettre par contre toutes les dates de la tournée
Pierre :
Je voudrais en arriver à Katel qui est un peu votre petite protégée ?
Yann Tiersen :
Je ne la connaissais pas du tout et je l’ai découverte sur scène à Saint Lo. Elle a un univers super fort, quelqu’un qui écrit des textes incroyables, qui a une voix super belle, qui est sans concession. Ca m’est rarement arrivé de découvrir quelqu’un qui puisse avoir un univers présent immédiatement. Je vous assure qu’elle va beaucoup compter dans le paysage musical français.
Pierre :
Où serez vous dans les mois qui viennent ?
Yann Tiersen :
Lundi prochain nous partons pour l’Australie, l’Indonésie et ensuite la Chine. Et après on revient au Bataclan juste avant les fêtes.