David Walters - Festival Art Rock 2006

David Walters - Interview 2006

David Walters - Concert L'Olympia (Paris) 2009

David Walters - Festival Chorus 2022




Interview

David Walters - Interview - Pierre Derensy


Chez David Walters toutes les musiques sont les bienvenues. Sans plan, sans boussole, dans sa maison gorgée de soleil, on peut facilement se perdre dans les pièces. De celles où les fenêtres brillent sur l’intime, jusqu’à celles contiguës qui reflètent l’immensité de l’univers, ses compositions prennent et rejettent la modernité et les musiques millénaires pour offrir des chansons personnelles certes mais surtout originales et spontanées.

Pierre :
Est ce que la blessure qui a stoppé net votre carrière de sportif vous a finalement été bénéfique ?
David Walters :
Completement. Ce genre d’épreuve il faut savoir les transformer. L’athlétisme est un sport qui demande de l’assiduité, avec beaucoup de travail pour avoir un minimum de résultat. Ce qui ressemble à ce que représente la musique. J’ai transformé l’énergie que je mettais dans le sport sur la musique.
Pierre :
La rigueur d’un sport se transmet elle d’une certaine manière à votre carrière musicale et de quelle manière ?
David Walters :
Plutôt dans le travail personnel : la régularité, s’accrocher aux instruments, travailler la voix et surtout travailler la créativité, la développer.
Pierre :
Vos 11 chansons sur l’album ont été faites sans échauffements ou alors avez-vous pris le temps de bien vous préparer avant de sauter dans le bac à disque ?
David Walters :
Elles sont venues tout seul avec le temps. Pour en faire 11 j’ai du en écrire 40. J’ai toujours des morceaux en « réserve ». Quand je sens que les morceaux ont besoin de grandir, j’attend un moment. C’est identique à un plat : il faut qu’il mijote, qu’il vive sur les fourneaux. Depuis que je fais de la scène j’essaye de les jouer pour les faire mûrir.
Pierre :
Vos premiers amours musicaux se conjuguaient avec le besoin de bouger le corps sur des dance-floor ?
David Walters :
La musique m’a toujours fais bouger. Depuis petit j’écoutais pleins de choses. Marley, Isaac Hayes, James Brown ensuite je me suis plutôt orienté vers le rock : Led Zep, Hendrix, Black Sabbath, les Doors ensuite je suis revenu vers mes origines musicales mais plus dans le courant hip-hop pour explorer l’acid-jazz, la house. Ce qui fait qu’aujourd’hui ma musique est éclectique.
Pierre :
Dans quel style vous mettriez vous ?
David Walters :
J’aime tous les styles. C’est tout ce que j’ai digéré. J’aurais du mal à me cantoner à un seul style sauf si j’écris pour quelqu’un. Quand j’ai fais mon album j’avais envie que ce soit foisonnant et varié.
Pierre :
Votre premier album s’appelle « Awa » qui signifie «Non » en créole, bizarrement quand on commence une carrière on est plus enclin à dire « oui » à tout ?
David Walters :
Je ne suis pas carriériste. Aujourd’hui je fais de la musique, hier du sport, demain je ne sais pas ! je serais peut être charpentier ou artisan. Tout se rejoint. Je suis plus dans un chemin de vie. Mon « non » est plus lié à un chemin de vie du moment ou l’on fait ses courses jusqu’au bulletin de vote. C’est un non positif, d’affirmation. Une révolte mais une révolte douce. Une révolte de rêveur.
Pierre :
Vous vouliez appeler votre album « Negropolitain » pourquoi avoir voulu changer le titre ?
David Walters :
On me l’a déconseillé. Même si je fais mes choix, je suis à l’écoute des gens avec qui je travaille et envers qui j’ai une entière confiance. En France et dans les pays francophones, le mot ‘nègre’ à une connotation violente pour les gens. Ce qui est normal puisque l’histoire avec les nègres vient juste à peine d’être reconnu ce 10 mai 2006 avec la commémoration de l’abolition de l’esclavage.
Pierre :
C’est peut être le moment de se le réapproprier dans le coté positif ?
David Walters :
C’est vrai mais il est suffisamment inscrit dans ma bio et mes interviews pour qu’il ne soit pas nécessaire d’être le titre de mon disque, parce que même si je défend mes origines j’en ai 3 et je n’ai pas du tout envie de m’enfermer dans le communautarisme. Ce qui m’intéresse c’est le mélange de mes cultures.
Pierre :
Vous habitez Marseille, cette ville colle bien à votre musique, vous a t’elle aidé à vous donner confiance ?
David Walters :
Completement. J’ai démarré mon travail là-bas, parce que c’est une ville cosmopolite, aux portes de l’Afrique et là j’ai rencontré beaucoup de musiciens d’influences divers qui ont nourris mon travail.
Pierre :
Les sons que vous exprimez sur cet album sont un mixage entre des rythmes anciens et des technologies nouvelles, avez vous eu des réactions négatives à votre disque dans le sens ou vous trahiriez une culture ?
David Walters :
Non car je ne trahis personne ! De toute manière je ne triche pas ! je ne me fais pas passer pour ce que je ne suis pas. Les choses sont clairs. Quand je vois des antillais je leur dis que j’ai grandis en France et quand je vois des français je leur dis qu’une partie de ma culture vient des antilles. Les réactions négatives que j’ai pu avoir sincèrement je n’en ai pas trop eu (rire) ou alors dans la construction : mes potes qui m’ont toujours entendu sur du hip-hop, de la soul, et qui me voyaient brasser le créole, l’anglais, le français sur des rythmes venu de tout horizons se sont demandé où je pouvais aller ! Après, le public, la presse, me renvoient de bons retours. Ce n’est pas un carton mondial mais un disque qui prend son rythme.
Pierre :
Vous évitez le claquage de cette manière ?
David Walters :
Exactement. Pour moi le disque c’est marquer son travail dans le temps. Des disques il y en aura d’autres mais ce qui vit et grandis tous les jours ce sont mes concerts.
Pierre :
Pouvez-vous m’expliquer les caractéristiques de ce Cristal Bachet, cet instrument que vous avez découvert ?
David Walters :
J’utilise de l’eau pour humidifier mes mains sur des tiges en verre.
Pierre :
Vous venez en concert seul sur scène ou en formation ?
David Walters :
Seuls avec pleins de sons. J’ai un instrumentarium avec differentes couleurs musicales. Pour résumer : j’ai un instrument rythmique , une percussion Bachet, ce fameux cristal Bachet, une guitare et ma voix.
Pierre :
Vous avez fait des premières parties prestigieuses (Bowie, Morcheeba, Kravitz et Jamiroquai) avez vous beaucoup appris aux contacts de ces artistes ?
David Walters :
Je les ai tous rencontré et j’ai partagé des moments formidables avec eux. Ils m’ont tous donné un retour positif sur mon travail. Ca m’encourage à continuer. Je pense que sur ce qu’ils me disent il y a beaucoup de vrais.
Pierre :
Vous êtes l’exemple d’un métissage artistique, que pensez vous des nouvelles lois sur l’immigration proposé par Sarkozy ?
David Walters :
Je n’ai pas envies de m’exprimer sur ce sujet. Tout simplement parce que je ne veux pas prendre partie, par contre j’ai pris partie sur la commémoration. J’ai écris un texte. C’est plus facile d’exprimer mes idées sur ce sujet car je le connais.
Pierre :
Vous pourriez me livre ce texte pour terminer l’interview ?
David Walters :
Oui le voici :
Aujourd’hui derrière le cliché exotique
les confidences se font et Les langues se délient
pour que l’homme se souvienne
Nos cités se réveillent et se tournent
vers le poids du passé ...un moment officiel
le 10 mai 2006… premier pas vers l’avant
La mémoire de l’oubli nous rassemble en conscience...en silence
Sans oublier qu'on a quelquefois été vendu par nos frères
Un vieux dossier enfouit comme un casier judiciaire
Loin des livres d’écoles et des maillons pour faibles
La vérité refait surface et déchaîne ses fers
combien d’îles oubliées pour fonder l’archipel ?
combien de vies d’enfer sur nos terres promises ?
peut-on vraiment effacer des vies entières de souffrance
par une minute de silence ?
Guadeloupe, Guyane, Martinique, Mayotte, Nouvelle Calédonie, Polynésie, Réunion,
Saint Pierre et Miquelon, la Terre Adélie, les Terres Australes, Wallis et Futuna...
. fok nou lov nou*.
L’époque où l’homme vendait sa peau
Pour sauver son âme n’est pas révolue
ça se passe juste en bas de chez toi… au coin de ta rue
et tant que ce problème ne sera pas résolu
on pourra toujours se donner bonne conscience
à coup de minutes de silence…
ça n’effacera jamais des vies entières de souffrances
certes.. mais cette mise en lumière sur l’ardoise du passé
est un signe pour qu on n’oublie jamais ce qui nous a échappé.
Des siècles de silence qui nous ont divisés
Derrière le cliché exotique....